Baromètre CAC 40 – La rémunération des dirigeants en 2020 et en période de crise sanitaire

Conformément aux recommandations du Code AFEP/MEDEF, « Tous les éléments de rémunération potentiels ou acquis des dirigeants mandataires sociaux doivent être rendus publics immédiatement après la réunion du conseil les ayant arrêtés. » La rémunération, définie ici au sens large, s’entend y compris régimes complémentaires de prévoyance (décès, arrêt de travail, santé).

Rémunération fixe et variable

Les documents d’enregistrement universel de notre panel communiquent notamment les montants de rémunérations fixe et variable des dirigeants, suivant les recommandations du Code AFEP/MEDEF. 85 rémunérations de dirigeants du CAC 40 ont ainsi été collectées.

Plus de la moitié des dirigeants ont une rémunération fixe comprise entre 500k€ et 1M€, allant de 100k€ à 2,8M€.

 

18% des dirigeants n’ont perçu aucune rémunération variable en 2020, conséquence des baisses consenties pendant la période de crise sanitaire. Un dirigeant a cependant perçu 5,7M€ de rémunération variable cette même année.

Critères de rémunération et de performance

Les critères de performance des dirigeants sont listés dans les rapports annuels, on y trouve fréquemment des critères financiers et quantifiables d’une part, et des critères personnels et qualitatifs d’autre part. Parmi les critères financiers, on retrouve majoritairement la croissance du chiffre d’affaires ou du bénéfice net, la marge opérationnelle/l’excédent brut opérationnel, le flux de trésorerie disponible et le taux de fréquence des accidents du travail. Du côté des critères qualitatifs, il s’agit davantage d’objectifs de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) en particulier la santé et la sécurité des collaborateurs, de ressources humaines (politique de diversité, éthique, gestion et développement des talents…), de satisfaction clients ou encore d’innovation. Souvent un critère de gestion de la crise et de l’après-crise a été ajouté dans les critères 2020.

En particulier, les enjeux de développement durable sont évoqués dans les documents d’enregistrement universel et le critère de RSE est bien présent et explicitement notifié dans les critères de rémunération variable. A la marge, ce critère est implicite au travers du critère “Santé et Sécurité” notamment. Plus largement, les groupes abordent les risques extra-financiers et évoquent unanimement leur implication dans la réduction du réchauffement climatique dans leurs documents d’enregistrement universel. Le changement climatique est bien au cœur de la stratégie des groupes du CAC 40.

 

Baisses de rémunération en 2020

Parmi les groupes du CAC 40, 30 ont évoqué une baisse de rémunération pour l’un de leurs dirigeants, participant ainsi aux efforts nécessaires pour faire face à cette crise. Au global, plus de 60 dirigeants sont concernés par de telles mesures et ont vu leur rémunération réduite en 2020. Les baisses de rémunération n’ont généralement pas été définies en tenant compte du taux d’activité partielle dans l’entreprise et de sa durée mais ont été appliquées sur une période (trimestre, semestre…), et majoritairement sur l’exercice 2020 (près de deux-tiers des baisses de rémunération). En outre, certains rapports indiquent un report de paiement de la rémunération, en particulier au cours des premiers mois de crise sanitaire.

Cette baisse consentie de rémunération repose sur des assiettes différentes : réduction de la rémunération fixe, réduction de la rémunération variable, renonciation aux actions de performance ou à augmentation. La réduction varie de 2% à 100% de l’assiette. Pour rappel, la recommandation de l’AFEP du 29 mars 2020 demande aux sociétés bénéficiant du dispositif d’activité partielle de réduire d’un quart la rémunération globale des dirigeants au prorata de la durée de recours au dispositif (préconisation par ailleurs reprise par le gouvernement). La durée de recours à l’activité partielle ou la sollicitation de l’aide de l’Etat ne sont pas communiquées dans la majorité des rapports annuels bien que la période de crise sanitaire ait amené de grandes entreprises à avoir recours à l’activité partielle. Parmi le panel, 53% des groupes auraient eu recours au chômage partiel et/ou la sollicitation de l’aide de l’Etat[1].

Comme certains documents d’enregistrement universel l’ont précisé, quelques-unes de ces économies seront reversées à des fonds de solidarité luttant contre la Covid-19 ou à d’autres dispositifs en lien avec la crise.

Ratios d’équité

En outre, en 2019, la loi PACTE a introduit l’obligation pour les sociétés cotées françaises de publier annuellement les rapports entre le niveau de rémunération de chaque dirigeant et les rémunérations moyenne et médiane des salariés à temps plein de la société.

Ces « ratios d’équité » sont présentés dans les rapports des groupes du CAC 40, majoritairement sur le périmètre de la société cotée, mais parfois sur un périmètre plus large et jugé plus pertinent (souvent le périmètre France).

Au travers des 40 documents d’enregistrement universel, plus de 80 ratios d’équité concernant la rémunération des dirigeants sont ainsi partagés.

Exemple de lecture : 36,9% des dirigeants ont une rémunération de 20 à 40 fois la rémunération moyenne des salariés de leurs entreprises

Exemple de lecture : 23,8% des dirigeants ont une rémunération jusqu’à 20 fois la rémunération médiane des salariés de leurs entreprises

[Note : lorsque 2 ratios d’équité sont affichés dans le document d’enregistrement universel, le ratio d’équité sur les salariés de la société cotée a été retenu]

La majorité des ratios d’équité exprimés par référence à la rémunération moyenne des salariés est inférieure à 40. 35,7% de ces ratios sont compris entre 0 et 20, ce qui signifie que plus d’un tiers des dirigeants a une rémunération jusqu’à 20 fois la rémunération moyenne des salariés à temps plein des sociétés dans lesquelles ils dirigent. 6% de ces ratios sont supérieurs à 60, quand plus de 10% de ces ratios l’était en 2019.

Plus de la moitié des ratios d’équité, exprimés par référence à la rémunération médiane des salariés, est également inférieure à 40. 31,3% de ces ratios sont compris entre 20 et 40, ce qui signifie que 31,3% des dirigeants ont une rémunération entre 20 et 40 fois la rémunération médiane des salariés à temps plein des sociétés dans lesquelles ils dirigent. 2,5% de ces ratios sont supérieurs à 80, quand plus de 10% de ces ratios l’était en 2019.

Le niveau des ratios a globalement diminué en 2020, s’expliquant par les baisses de rémunération des dirigeants face à la crise de la Covid-19.

 

Index de l’égalité professionnelle

Les groupes sont par ailleurs soumis à la publication de la note de l’index de l’égalité hommes-femmes. Depuis sa création par la loi dite « Avenir pro » en 2018, les entreprises de plus de 50 salariés ont dû cette année publier leur 3ème index égalité hommes-femmes (H/F)[2]. Si l’échéance de publication a pu en partie être différée de 2 mois en raison de la crise sanitaire[3], les entreprises du CAC 40 ont été nombreuses au rendez-vous de la publication de leur index 2020 au 1er mars 2021.

Parmi notre panel, la majorité des groupes mentionne l’index de l’égalité professionnelle dans le document d’enregistrement universel. Pour les autres, l’information a été recueillie sur le site institutionnel ou le cas échéant, sur le site du Ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion. L’index publié est très largement l’index 2021 au titre de 2020, seulement pour quelques groupes l’index communiqué à fin avril est l’index au titre de 2019. En termes de périmètre, l’index publié est très souvent l’index moyen pondéré (index consolidé) sur les entités françaises. Sont alors considérées les entités de plus de 50 salariés et suffisamment mixtes pour permettre le calcul de l’index. Certains groupes calculent également cet index sur leurs entités à l’international.

Retour sur cette exigence encore récente

L’ensemble des entreprises de plus de 50 salariés doivent procéder au calcul de 4 indicateurs au titre de l’année précédant celle de la publication (index N publié au plus tard le 1er mars N+1) établis à partir de critères sur :

  • L’écart de rémunération ;
  • L’écart d’augmentation individuelle ;
  • Le taux de salariées ayant bénéficié d’une augmentation à leur retour de congé maternité si des augmentations ont été décidées au cours de ce congé pour les autres salariés ;
  • Le niveau de parité parmi les 10 salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations.

Un 5ème indicateur basé sur l’écart de taux de promotion doit être calculé pour les entreprises de plus de 250 salariés.

Les libellés des indicateurs en témoignent, il s’agit plus précisément d’un index sur l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, facilement objectivable. Afin d’obtenir un score le plus proche de la réalité, certains éléments de rémunération ne sont pas pris en compte tels que les indemnités de départ en retraite, les primes d’ancienneté, les heures supplémentaires ou encore les sommes versées au titre de la participation ou l’intéressement et certains salariés sont exclus du scope de calcul notamment les contrats en alternance, les salariés en pré-retraite, les salariés expatriés.

Sur la base de ces calculs, deux données doivent être communiquées annuellement via une publication sur le site internet, une communication interne (via le Comité Social et Economique) ainsi qu’un envoi à la DIRECCTE (ce dernier est alors plus fourni pour des besoins statistiques) : l’index H/F exprimé sur un total de 100 points ainsi que le score de chacun de ces indicateurs.

La réglementation a instauré un seuil minimal de 75/100 en-deçà duquel l’entreprise défaillante s’expose à des pénalités financières en l’absence de redressement au terme de trois exercices. La pénalité prononcée par l’autorité administrative peut atteindre 1% de la masse salariale soumise à cotisations sociales. Avant la coercition, la prévention : un score insuffisant déclenche également l’obligation de négocier sur l’égalité H/F au sein de l’entreprise ou sur la programmation d’un rattrapage salarial.

Les index de l’égalité hommes-femmes au sein des entreprise du CAC 40 sont principalement compris entre 85 et 95 avec une volonté unanime de viser 100 à court ou moyen terme. Le détail des index décliné à travers les 5 indicateurs n’est en revanche que très peu communiqué. Lorsque le détail est présenté, on constate à l’unanimité que les points restants à acquérir se trouvent dans les indicateurs d’écart de rémunération et du niveau de parité parmi les dix salariés ayant perçu les plus hautes rémunérations. Ce dernier indicateur constitue la marge de manœuvre la plus importante pour augmenter les index.

Rappelons que l’année 2020 a été spéciale à tous les points de vue et que les derniers index ont pu être quelque peu perturbés. En effet, comme le précise le ministère du travail dans un Questions-Réponses en ligne, les salariés placés en activité partielle ne doivent pas être pris en compte dans les effectifs de calcul. Les groupes du CAC 40 affichent ainsi « incalculable » pour certains de leurs indicateurs au titre de 2020, s’expliquant par la difficulté d’application de ces indicateurs non adaptés au contexte sanitaire exceptionnel.

Prochaines échéances : la publication d’un rapport commandé par le Gouvernement pour le 1er janvier 2022 afin d’avoir une première idée de l’effectivité de cette exigence d’affichage[4] et l’arrivée au terme des premières périodes de redressement avec de potentielles premières pénalités financières lors de la prochaine échéance de publication (mars 2022).

L’index de l’égalité hommes-femmes est un des leviers qui s’inscrit dans la politique bien-être au travail visant la satisfaction et l’épanouissement des salariés. Cet index a aussi sa place dans la politique RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) portant sur des enjeux environnementaux, sociaux, économiques et éthiques.

 

[1] Information recueillie principalement dans les documents d’enregistrement universel, complétée par des communications sur internet

[2] 2ème index en date pour les entreprises de moins de 250 salariés.

[3] Décret n°2021-254 du 10 mars 2021.

[4] Art. 104, dernier paragraphe, Loi n°2018-771 du 5 septembre 2018.

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