Le 19 décembre dernier, l’ACPR a mis en ligne sa position relative à l’évaluation et l’honorabilité des membres du Conseil d’administration (CA) ou du Conseil de surveillance (CS) des organismes du secteur de l’assurance.
Elle fait suite à une recommandation de l’EIOPA envers les superviseur nationaux (ACPR en France) de veiller à ce que l’honorabilité des personnes précitées soit suivie « en continu selon une approche fondée sur les risques ».
Pour rappel, aux termes des articles L. 322-2 du Code des assurances, L. 114-21 du Code de la mutualité et L. 931-7-2 du Code de la sécurité sociale, l’ensemble des membres du CA ou du CS doivent disposer en permanence de la compétence, de l’expérience et de l’honorabilité nécessaire. Cette obligation constitue, pour les organismes soumis à la directive Solvabilité II, une condition d’octroi de l’agrément par l’ACPR permettant aux organismes assureurs d’exercer leur(s) activité(s).
Ce document complète la réglementation française et européenne applicable en précisant quelles actions un organisme assureur peut mettre en œuvre afin de s’assurer de manière régulière du respect de cette condition d’agrément.
Le cabinet GALEA & associés vous propose une synthèse de la réglementation applicable en la matière en précisant à chaque fois, les apports de la position de l’ACPR objet du présent article. Ces apports portent essentiellement sur les critères étendus ains que sur les modalités d’évaluation de l’honorabilité.
Les apports de la position de l’ACPR sont signalés en bleu.
Pourquoi cette évaluation ?
L’évaluation de l’honorabilité des membres du CA ou du CS est une condition d’octroi du ou des agréments demandés auprès de l’ACPR.
Qui est concerné par cette obligation ?
Les entreprises d’assurance et les fonds de retraite professionnelles supplémentaires, les mutuelles et unions régies par le livre II du code de la mutualité et les mutuelles de retraite professionnelles supplémentaires, les institutions de prévoyance et unions de prévoyance.
Quand ?
Cette évaluation est réalisée par l’ACPR au moment de chaque demande d’agrément ou d’extension d’agrément. Toutefois, le respect de cette condition doit être permanent.
Comment ?
L’évaluation de l’honorabilité des membres du CA ou du CS est réalisée de manière individuelle. Ce qui n’est pas le cas de l’évaluation des compétences et de l’expérience qui sont des critères évalués collectivement.
Quels critères ?
* Absence de condamnation définitive depuis moins de 10 ans ;
* Evaluation de l’honnêteté et de la solidité financière, fondée sur des éléments concrets concernant le caractère, le comportement personnel et la conduite professionnelle, y compris tout élément de nature pénale, financière ou prudentielle pertinent aux fins de cette évaluation (Article 273 du Règlement UE n°2015/35) ;
Afin de s’assureur de l’honorabilité des membres du CA ou du CS, les organismes assureurs devront ainsi vérifier l’absence de condamnation définitive depuis moins de 10 ans mais également l’absence des éléments suivants :
* infractions et procédures définitives ou en cours relatives à l’activité bancaire, financière ou d’assurance, la lutte contre le blanchiment, la fraude ou le crime financier, les infractions fiscales ou à la législation relative aux sociétés, à la faillite, à l’insolvabilité ou à la protection des consommateurs ;
* éléments démontrant que la personne ne s’est pas montrée transparente et coopérative avec une autorité de contrôle sectorielle ;
* difficultés à honorer des dettes, ou encore des investissements, expositions ou emprunts disproportionnés et risqués (éléments concernant la solidité financière de la personne concernée).
Quelles actions à mettre en œuvre pour s’assurer du respect de cette condition ?
* Mettre en place une politique écrite sur l’honorabilité des membres des organes collégiaux (Article 273 du Règlement UE n°2015/35) ;
* La position précise que l’assureur devra mettre en place un règlement intérieur, une charte ou un code de conduite qui devra prévoir « des principes illustrés par des exemples de comportements inacceptables liés notamment aux fausses déclarations et aux mauvaises conduites financières, à la criminalité économique et financière ».
* Evaluation annuelle de l’honorabilité (et non plus uniquement au moment de la prise de fonction) :
– l’obligation pour les organismes assureurs d’évaluer au moins 1 fois par an l’honorabilité de membres de son CA ou CS.
– la position précise aussi que la politique écrite devra prévoir cette évaluation annuelle et ses modalités de mise en œuvre puisqu’il est indiqué : « cette évaluation doit être réalisée par l’organisme sur une base au moins annuelle suivant une procédure documentée de la politique écrite [de l’article 173 du règlement européen précité] ». La position préconise par exemple l’utilisation de déclarations sur l’honneur.
* Le devoir de mener des diligences complémentaires selon une approche « fondée sur les risques » : en cas doutes sur l’honorabilité suite à une conduite personnelle ou professionnelle d’un membre du CA ou du CS.
* Remontée des informations à l’ACPR : En cas de de fait ou de comportement susceptible de compromettre l’honorabilité, l’organisme assureur devra en informer l’ACPR. Il devra également prendre les mesures pour « garantir une gouvernance conforme à la réglementation ».
Quelles sanctions ?
Le collège de supervision de l’ACPR peut s’opposer à la nomination ou à la poursuite du mandat d’un membre du CA ou du CS qui ne respecterait pas cette condition d’honorabilité (L. 612-23-1 Code monétaire et financier).
Avec la publication de cette position, on peut raisonnablement penser que l’honorabilité des membres des organes collégiaux des organismes assureurs pourrait constituer un axe de contrôle privilégié de l’ACPR pour l’année 2020.