Au-delà de la gestion des difficultés opérationnelles rencontrées ces dernières semaines, les entreprises d’assurance et de réassurance sont attendues sur le plan règlementaire, notamment par l’ACPR qui a livré ses préconisations sur les évaluations de la solvabilité du premier trimestre de 2020.
1- L’assouplissement provisoire des délais de remises réglementaires
L’ACPR a publié le 26 mars 2020 un communiqué relatif à l’assouplissement des dates de remises des états de reporting prudentiel européens et nationaux. Hormis quelques états jugés majeurs (Bilan, Projections des flux futurs de trésorerie en vie, Impacts des mesures relatives aux garanties de long terme et des mesures transitoires, Fonds propres et Capital de Solvabilité Requis), le délai accordé aux entreprises s’établit à :
- huit semaines pour les remises annuelles solo et groupe (soit respectivement le 2 juin et le 14 juillet 2020) ;
- une semaine pour les remises trimestrielles solo et groupe au 31 mars 2020 (soit le 12 mai 2020).
La remise de l’état trimestriel sur les transactions sur les produits dérivés est quant à elle repoussée au 2 juin.
Concernant les rapports narratifs annuels (rapport au contrôleur, rapport public sur la Situation Financière et la Solvabilité), hormis les états publics jugés majeurs, la remise aux autorités de contrôle et la publication sur le site de l’entreprise sont décalées de huit semaines également. Les entreprises auront jusqu’au 31 décembre 2020 pour fournir le rapport relatif à l’évaluation interne des risques et de la solvabilité (ORSA).
Pour mémoire, les entreprises d’assurance et de réassurance remettent un ensemble d’états trimestriels qui permet au superviseur de suivre régulièrement le niveau de la solvabilité.
L‘exigence de reporting trimestriel est définie selon des seuils imposés par la règlementation, qui s’établissent à :
- 8 milliards d’euros de bilan pour les entités vie ;
- 0,5 milliard d’euros de bilan pour les entités non-vie.
En deçà de ces seuils, les entreprises remettent uniquement l’état relatif au minimum de capital requis (MCR).
Les organismes ont mis en œuvre les moyens nécessaires pour effectuer les travaux requis et indiquer les niveaux de solvabilité à fin mars. Des publications sont attendues dans les prochaines semaines, elles seront particulièrement suivies.
2- La prise en compte de la crise dans le reporting Solvabilité 2
Si les délais de remises du reporting sont assouplis pour permettre aux entreprises de s’organiser au mieux et ont sans aucun doute donné un peu d’oxygène aux assureurs, l’EIOPA, rejoint par l’ACPR, formulent un certain nombre de préconisations et de demandes aux entreprises :
- « [..] l’EIOPA considère que les entreprises doivent concentrer leurs efforts sur le suivi et l’évaluation de l’impact de la situation engendrée par le Coronavirus/COVID-19 et assurer leur continuité opérationnelle. Dans ce contexte, la transmission des informations aux autorités compétentes pour le Q1-2020 revêtira une importance capitale, à la fois pour les entreprises d’assurance et de réassurance et pour les autorités compétentes. » ;
- « L’Évaluation Interne des Risques et de la Solvabilité (EIRS-ORSA) pourra être remise au superviseur au plus tard le 31/12/2020. Ce délai permettra en outre d’intégrer, le cas échéant, les conséquences de la situation liée au Coronavirus dans l’évaluation de la situation individuelle des organismes. »
Le régulateur sera probablement exigeant et regardant concernant les informations quantitatives qui seront transmises pour la première remise trimestrielle de 2020.
Étant donné les évènements survenus, de nature à modifier au moins ponctuellement le profil de risque des entreprises d’assurance et de réassurance, un recalcul précis des SCR au 31 mars 2020 est souhaitable, compte tenu :
- de l’évolution de la valeur des actifs financiers ;
- du niveau des taux d’intérêt ;
- de l’éventuelle dérive du ratio « sinistre sur primes » du premier trimestre ;
- de l’éventuelle sur-morbidité observée.
Cette exigence est au moins obligatoire pour les entreprises qui remettent l’état des fonds propres (S.23.01), i.e. les entreprises dont le total bilan s’élève à plus de huit milliards d’euros pour les garanties vie et à plus de 500 millions d’euros pour les garanties non-vie. Néanmoins, elle pourrait s’appliquer à toutes les entreprises d’assurance et de réassurance, quelle que soit la taille de leur bilan suivant l’impact escompté de la crise. Des méthodes approchées et proportionnées pourront être mises en œuvre pour estimer cet impact.